Les champs électriques et magnétiques qui nous entourent ont-ils un impact sur notre santé? Comment s’en protéger? Aucun lien direct avec la santé n’a été clairement établi mais, dans le doute, le simple fait de s’éloigner un peu des appareils électriques réduit fortement l’intensité du champ auquel on est exposé.
Wifi , GSM, radio-réveil, babyphone… Les champs électriques et magnétiques sont partout dans notre environnement. Certains s’en inquiètent, mais disons d’emblée que «l’analyse globale de la littérature scientifique ne permet pas de conclure à un effet démontré (sur notre santé)» (1). De quoi parle-t-on quand on évoque «les ondes»? «Le spectre des champs électromagnétiques est très long», fait observer Maryse Ledent (chercheuse en santé publique à l’Institut Scientifique de Santé Publique, ISP): «il va des aimants (0Hz), à la fréquence de 50Hz du réseau électrique, ensuite on trouve la FM (100MHz), les télévisions (50-850MHz), les services d’urgence (400MHz), les GSM 2G, 3G et 4G (900-2600MHz), le téléphone sans fi l (1900MHz) et le wifi (2400-5800MHz). Il y a également les satellites (10GHz), l’infra-rouge (30THz), la
lumière visible (600THz), puis les UV, les rayons X et gamma». En 2013, le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) a classé les champs électromagnétiques de radiofréquence des téléphones mobiles dans le groupe 2B «peut-être cancérogène pour l’homme». Au même titre que les gaz d’échappement, le café, les fibres céramiques et de verre, l’essence… Ces champs représentent donc un risque faible et s’ajoutent à d’autres facteurs de risque possibles.
Loin de soi
Ce qu’il convient de savoir, c’est que «l’intensité des champs électriques et magnétiques diminue avec la distance par rapport à la source». Leur intensité dépend de la puissance et les champs sont vectoriels, ce qui signifie qu’ils ont un sens et une direction.
Maryse Ledent a mesuré, sur eux et puis en s’éloignant, les champs émis par différents appareils. «Le radio-réveil c’est classiquement quelque chose qui n’inquiète pas les gens. Pourtant, ils sont parfois beaucoup plus exposés via le radio-réveil électrique que, par exemple, via les lignes à haute tension. On mesure les champs 50Hz les plus importants près du transformateur. Le problème est le même près du chargeur du GSM. La diminution des champs en fonction de l’éloignement de la source est valable aussi pour le four à micro-ondes, les téléviseurs, le babyphone…, tout en sachant que ce dernier n’émet que s’il perçoît du bruit.»
Faut-il couper le wifi si on ne s’en sert pas? Le même principe de distance prévaut ici aussi mais la puissance du routeur s’adapte en fonction de ce qui est émis ou reçu. «Pour certains, le wifi ne pose pas de problème parce que dès qu’on s’éloigne, les valeurs sont très faibles (2,5V/m sur la borne, < 150mV/m à 3m). Mettre votre routeur dans une pièce où on ne dort pas, c’est une bonne idée parce que les valeurs seront plus faibles.» En cas de pose de panneaux photovoltaïques, les champs 50Hz les plus importants sont mesurés au niveau de l’onduleur qui transforme les champs statiques en champs alternatifs 50Hz. En général, il est placé à côté du compteur électrique.
Jamais sans mon G
Puis-je dormir avec mon GSM? «Les études ne permettent pas encore de mettre en évidence un danger», affirme-t-elle. «Ensuite, tout dépend du type de GSM, de la qualité de la réception et de son usage (qu’en est-il de la qualité du sommeil?).» La distance joue aussi: placé à 10cm de la tête (sous l’oreiller par exemple), il y a déjà une baisse du champ. Par ailleurs, lors d’une conversation, celui qui écoute est soumis à un champ moyen plus faible que celui qui parle. De même, quand on télécharge avec son GSM, le temps de réception est long mais d’intensité faible. De plus, à ce moment-là, il n’est plus collé à l’oreille mais au bout des doigts. Pour téléphoner, il est donc préférable d’être dans les meilleures conditions de réception possible et les oreillettes filaires permettent de réduire l’intensité du champ au niveau de l’oreille. «D’une manière raisonnable, si on est inquiet par rapport aux champs électriques et magnétiques et si on en a l’occasion, utilisons notre GSM dans des conditions de réception correcte et, pour les autres appareils, pourquoi ne pas s’en éloigner un petit peu?», conclut Maryse Ledent.
Electrosensible?
Pourquoi parle-t-on plus d’électrosensibilité ces dernières années? «Le début est un peu compliqué», précise Maryse Ledent. «Est-ce que l’électrosensibilité fait partie des ‘Modern Health Worries’, les inquiétudes nées des nouvelles technologies? Certains auteurs le pensent. En fait, on a vraiment commencé à en parler dans le courant des années ‘90, donc bien après l’avènement de l’électricité. Les premiers cas ont été décrits en Norvège et Suède: les gens se plaignaient de rougeurs au visage lorsqu’ils utilisaient longtemps leur ordinateur.»
En Belgique, les chercheurs se sont réellement penchés sur le sujet au début des années 2000 via le BBEMG, le Belgian BioElectroMagnetics Group. (2) «Ces dernières années, il y a une sorte de bruit de fond, on en entend toujours parler mais moins fréquemment. Est-ce parce qu’elle n’est pas suffisamment comprise et que les personnes qui ont des symptômes (maux de tête, troubles du sommeil…) ne les rattachent pas à l’électrosensibilité? Ou, au contraire, est-ce parce qu’elles estiment que les pouvoirs publics ne font rien et que ce n’est pas la peine d’en parler?»
Pour l’instant, les patients qui se plaignent de symptômes attribués à l’électrosensibilité peuvent être pris en charge par une thérapie de type cognitivo-comportementale (TCC), l’idée étant de travailler directement sur les symptômes.
Certaines études montrent que cela améliore la situation, d’autres non. Une petite étude réalisée au CHU de Liège sur 8 patients ayant suivi des séances de TCC montre une diminution des symptômes dépressifs et anxieux, et de l’impact de l’électrosensibilité sur la vie personnelle… «Cette étude n’a pas permis de vérifier si c’était la TCC qui jouait un rôle ou si c’était simplement le fait d’avoir écouté ces personnes. Ces premiers résultats nous disent qu’il faut poursuivre dans cette voie mais ce n’est cependant pas pour ça qu’il faut penser que c’est ‘uniquement’ dans la tête.»
De nouvelles études devraient être conduites pour essayer de définir le lien entre champs électromagnétiques et santé: «On reste très ouverts», reconnaît la chercheuse, «parce qu’on ne peut pas dire qu’il n’y a pas de risque.»
Source: Pharma-Sphère
1. Rev Med Liège 2015;70(4):172-8
2. www.bbemg.be