Reconnaître la lucite estivale
• Photodermatose d’origine inconnue, cette pathologie touche majoritairement les jeunes femmes entre 15 et 25 ans présentant un phototype clair.
• Elle se manifeste par l’apparition de papules érythémateuses non confluentes, principalement au niveau du décolleté, des épaules, des bras et des jambes. Un prurit important y est associé.
• Cette éruption cutanée apparaît quelques heures à quelques jours après une exposition intense aux rayons ultraviolets solaires voire artificiels, principalement les UVA longs (340 à 400nm). Elle serait due à une réaction immuno-allergique locale médiée par les lymphocytes T.
• Cette dermatose récidive après chaque exposition solaire, puis s’atténue au fur et à mesure que le bronzage s’installe. Elle dure 1 à 2 semaines puis disparaît généralement sans traitement.
• La lucite estivale bénigne réapparaît chaque année, quelques fois en diminuant d’intensité, mais elle peut s’aggraver d’année en année avant de disparaître spontanément.
Quel traitement?
• Un dermocorticoïde permet de soulager les démangeaisons et de diminuer l’intensité de l’éruption.
• Un antihistaminique par voie orale peut également être conseillé en cas de prurit intense.
Quelle prévention?
• La base de la prévention de la lucite estivale bénigne est la protection solaire: vêtements couvrants, chapeau à bord large, soin solaire protecteur dirigé contre les UVB (SPF 50+) et les UVA.
• Les antipaludéens de synthèse ont une bonne efficacité dans la prévention de la lucite estivale. Ils feraient intervenir des effets anti-inflammatoires et immunosuppresseurs. Le traitement (2 x 100mg de chloroquine/j ou 400 à 600mg d’hydroxychloroquine par jour) est débuté 7 jours avant le début de l’exposition et poursuivi pendant les 15 premiers jours. Ils ne peuvent être pris au long cours en raison de risques oculaires.
• La PUVA-thérapie principalement offre de bons résultats également. Les séances (en moyenne 12 séances sur 3 semaines, commencées avant le début des expositions) réalisées chez le dermatologue permettent de délivrer des doses croissantes de rayons ultraviolets, qui entraînent une tolérance progressive de la peau au soleil.
• «Les photoprotecteurs non topiques représentent des mesures photoprotectrices adjuvantes prometteuses», explique Françoise Guiot, dermatologue à Grez Doiceau, «mais elles ne doivent en aucun cas se substituer aux mesures de photoprotection externes actuelles. Les caroténoïdes empêchent la formation des radicaux libres, mais ils doivent être pris pendant au moins 1 mois pour atteindre une imprégnation suffisante. En raison de dépôts rétiniens, une surveillance ophtalmologique est nécessaire si le traitement est prolongé. L’extrait de Polypodium leucotomos contribue à éliminer les altérations cliniques induites par les rayons UVB; il sera pris uniquement deux fois par jour lors de l’exposition au soleil. La vitamine B3 (nicotinamide) est parfois prescrite avec des résultats variables: son mécanisme d’action semble se baser sur l’hypothèse non prouvée d’une anomalie du tryptophane dans les lucites. À débuter 15 jours avant l’exposition».
Ne pas confondre lucite et urticaire solaire
L’urticaire solaire est relativement rare et concernemajoritairement les femmes entre 20 et 40 ans. Dans les lucites, l’éruption survient dans les heures qui suivent l’exposition, contre environ 15 minutes seulement dans l’urticaire solaire. L’aspect des lésions est assez similaire: un prurit intense est présent et les lésions disparaissent en 24 heures, voire moins. Enfin, des signes généraux peuvent être présents, avec un risque de choc anaphylactique, dans le cas de l’urticaire. La prévention met à profit la protection par des vêtements et l’emploi de soins solaires à spectre maximum. Les caroténoïdes et les antipaludéens de synthèse sont rarement efficaces. Le traitement passe par la prescription d’antihistaminiques à haute posologie.
L’éruption juvénile printanière
Proche de la lucite estivale, cette photodermatose touche surtout les garçons de 5 à 12 ans. L’éruption se localise sur le pourtour des oreilles sous forme de papules œdémateuses puis croûteuses. Elle débute après une exposition au soleil par temps froid, ne récidive pas aux expositions ultérieures au printemps ou en été, mais parfois les années suivantes.
Des dermatoses photo-aggravées au soleil
Acné
L’acné est aggravée par le soleil. En effet, si le soleil diminue transitoirement l’inflammation, il accroît la comédogenèse. En outre, les cyclines, la trétinoïne, l’isotrétinoïne et le peroxyde de benzoyle sont photosensibilisants. Leur emploi n’est pas contre-indiqué en période estivale, mais doit être associé à une photoprotection externe, l’absence d’exposition solaire entre 11 et 16 heures ainsi qu’à une administration vespérale de l’anti-acnéique.
Lupus érythémateux
Le déclenchement d’une éruption cutanée sur le visage au cours de la saison ensoleillée se voit dans environ la moitié des cas de lupus érythémateux chroniques et un tiers des lupus érythémateux systémiques. Le soleil peut révéler ou aggraver la maladie: apparition de nouvelles lésions cutanées ou systémiques. Herpès Les poussées d’herpès, en particulier sur les lèvres, sont souvent déclenchées par une exposition solaire. Cela justifie la recommandation d’utiliser un stick labial écran total qui peut éviter les récidives, à condition d’être appliqué précocement et régulièrement.
Porphyries cutanées
Celles-ci (maladies héréditaires liées à un déficit de l’hème les plus fréquentes) associent des bulles sur le dos des mains, une fragilité cutanée très nettement liée aux expositions solaires, une pigmentation du visage et une hypertrichose.
Atopie
Les rapports entre la dermatite atopique et les expositions solaires sont complexes. Des expositions modérées sont bénéfiques dans la plupart des cas moyennant l’application répétée d’un soin solaire à haut coefficient de protection, sans parfum, sans conservateur. 5% des patients atopiques présentent une authentique photosensibilité, ce qui fait de la dermatite atopique une des dermatoses possiblement photo-aggravées. Enfin, d’autres photodermatoses peuvent être observées chez les atopiques: photosensibilité médicamenteuse, eczéma photo-allergique de contact.
La photosensibilisation
La photosensibilisation est une réaction cutanée excessive aux UV solaires ou artificiels, d’origine iatrogène le plus souvent. Il existe deux types de manifestations: la phototoxicité (érythème douloureux apparaissant dans les heures suivant l’exposition) et la photo-allergie (lésions eczématiformes survenant plusieurs jours après l’exposition aux UV). Ces deux mécanismes ne sont pas antinomiques et beaucoup de médicaments photosensibilisants peuvent être à l’origine des deux réactions. La phototoxicité peut laisser place à une pigmentation anormale. Les photo-allergies peuvent évoluer sous forme rémanente vers la dermatite actinique chronique (photodermatose chronique et invalidante). Ainsi que le conseille le Dr Bernadette Blouard, dermatologue à Namur: «Le meilleur traitement en cas de réaction phototoxique ou photoallergique est l’application locale d’un dermocorticoïde, une à deux fois par jour au début. La réaction s’amende en général au bout de 8 jours. Sans oublier l’application de soins cicatrisants en complément. On peut y associer des antihistaminiques par voie orale».
Lies Debruyne
Source: Pharma-Sphère